Premier jour : voyage, voyage, plus loin que la nuit et le jour.
Il faut être prof de lettres classiques non seulement pour avoir ce genre de références musicales particulièrement classes mais également pour envisager l’hypothèse que partir de nuit, un dimanche pour décoller vers 6h le lendemain et enquiller une journée de visites, c’est une idée géniale. Moui. Parce que si vous ajoutez à la recette la présence d’élèves normalement excités par la coexistence avec des congénères pendant 5 jours et l’ambition de faire nuit blanche comme leurs parents au même âge ; si vous n’oubliez pas l’importance relative accordée par des chauffeurs pourtant experts à la ponctualité ; si enfin vous vous dites, un rien hyperbolique, que l’aéroport de départ se trouve au coeur de la région la plus embouteillée du monde occidental, alors en effet, l’idée devient moins géniale quand elle prend corps.
Évidemment, voir le verre à moitié plein c’est s’imaginer fermer l’œil un quart d’heure sans être dérangé par les ronflements du voisin collègue, le programme de rire et chansons imposé par le pilote ou les éclats de rire prepuberes à des heures indues au milieu d’un silence que l’on croyait définitif. C’est également accorder aussi peu d’importance à l’arrêt obligatoire au Mans avec lumière, froid extérieur et toujours ce rire adolescent suraigu qu’à l’enregistrement, la pesée des bagages, l’embarquement, l’attente interminable dans le hall de la chanson de Brel et toujours le ronflement trompettiste du collègue qui fait reconsidérer le projet de rester enseigner à ses côtés les 30 prochaines années.
Bref, le soleil se lève sur la Sicile. Tout s’est vraiment bien passé sur la route et dans les airs et l’auteur de ce billet lui-même est bien obligé d’en convenir, tout râleur qu’il soit. Les yeux sont petits, la curiosité et l’envie grandes mais rien comparé à la plaisante pensée d’une bonne douche vespérale.
Michel Décha