Lycée Gabriel Guist'hau

Lycée D Enseignement General – Nantes

Pays de la Loire
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Sixième jour

Sixième jour : d’une jetée l’autre

Sandrino -décidément il est temps de se séparer : cette proximité aurait pu nuire à nos familles respectives- nous propose ce matin de combler ce trou imbécile dans notre planning surchargé entre départ de l’hôtel et aéroport. Il connaît une plage assez proche, assez propre et de sable fin afin que nous puissions, à défaut d’un bain revigorant aux huiles essentielles issues des meilleurs tankers, écouter réciter du Baudelaire par les élèves qui, en tant qu’hommes libres, toujours chériront la mer (même si parfois, leur maladresse adolescente peut laisser penser que leurs ailes de géants les empêchent de marcher).

Déjà, le trajet vers le bord de mer est formidable : allées d’arbres  majestueux, falaises arides, absences relatives de danger routier.

Bon, en réalité, une fois sur place, ça se lance de l’eau, ça crie strident « arrêêête ! », ça s’enfuit hilare.

Un tel chauffeur, vous le comprendrez aisément, on le couvre de louanges et de cadeaux (puisqu’on n’a pas le courage de tout plaquer pour lui, non Sandrino, ce n’est pas raisonnable, pense à tes enfants, aux miens, aux nôt… Tu me fais perdre la tête Sandrino). Bref, ovations larges, pourboire proche de la rente viagère de feue Jeanne Calment et adieux interminables.

Nous apprenons par ailleurs que les élèves semblent signer une clause secrète lorsqu’ils s’engagent à faire un voyage scolaire : il faut qu’ils parviennent à désigner avec la plus grande discrétion (déjà, c’est pas gagné) quelqu’un pour faire semblant de s’égarer, suffisamment longtemps pour inquiéter les adultes encadrants (mais en dosant tout de même : inutile de vraiment fuguer, ça mettrait dans l’embarras) ; une fois que ce point est validé, il est indispensable qu’un autre perde au choix sa pièce d’identité, sa carte d’embarquement ou mieux encore tout le sac contenant les susdits papiers : en réalité, un complice se sera empressé de cacher les objets manquants. Le contrat précise que tout cela doit se réaliser uniquement le dernier jour, le plus tard possible avec de courts écarts entre les événements : il paraît que cela permet de faire vieillir d’une dizaine d’années d’un coup les enseignants. Bref, tout est rentré dans l’ordre. Un vol arrivé en avance. Des chauffeurs très sympathiques (mais

rien à voir avec Drino, soupirs) près de la jetée racontée par Chris Marker. Mais ce sont des personnels de l’éducation nationale plus âgés que vous rencontrerez tout à l’heure (vers 21h30) place A. Briand. Plus âgés mais ravis comme les élèves. À moins d’une autre clause secrète.

M.Décha